Interview de Manu pour Hardrock Magazine

hardrock2009

Vous sortez aujourd’hui votre 3 ème album qui s’intitule « Mindlag Project ». Pourquoi ce choix ?

Nous avons choisi de sortir un album éponyme car c’est avec celui-ci que tout se met réellement en place au niveau conceptuel. Mindlag Project signifie littéralement « Projet : décalage d’esprit », et c’est un néologisme datant de l’époque où j’étais encore sur les bancs du lycée. Ce que nous entendons par décalage d’esprit, c’est un certain désaccord avec une notion entretenue par notre code de valeur occidental, qui consiste à rapprocher systématiquement le concept de beauté de ce qui correspond à une valeur morale bénéfique, et inversement, de considérer comme laid ce qui est perçu comme maléfique par ce même code.
Nous avons donc pour leitmotiv d’entretenir une certaine esthétique dérangeante, et de démontrer par la même occasion que la beauté peut se trouver partout, y compris dans la mort, la souffrance, et le crime. C’est une approche assez Baudelairienne du concept de la beauté, même si cette idée est discourue depuis la nuit des temps.
Notre concept est plus précisément basé sur le récit de la vie de Jon De Grimpclat, qui est un sombre esthète, professeur de langues anciennes, se livrant à de sombres activités extrascolaires… et c’est à travers l’autopsie de son âme que nous illustrons notre propos.

Quels regards portez-vous aujourd’hui à vos 2 précédents albums sortis en 2003 et 2005 ?

Karybda et Skylla ne sont autres qu’une « bilogie », qui évoquent la descente aux enfers de Jon De Grimpclat. Celui-ci n’était pas encore explicitement présent, car nous laissions le mystère planer autour d’un sombre personnage, qui apparaît dans la dernière chanson de Skylla, intitulée Doomsday. Il ne s’est réellement matérialisé qu’avec la chanson « De charybde en scylla… » qui s’inscrit comme son acte de naissance criminel, à proprement parler, puisque c’est le récit de son premier crime.
Artistiquement parlant, ces albums représentent à nos yeux la genèse de notre concept, ils nous ont permis de planter un décor, et d’installer une certaine ambiance, en restant dans l’implicite. C’est un choix délibéré, en grande partie car nous ne maîtrisions pas à l’époque tous les paramètres requis pour servir le récit de Jon comme il se devait, et je pense que nous cherchions encore notre réelle identité musicale. Bien sur, nous ne renions en aucun cas notre passé, même si certains aspects de notre musique, et surtout de la production, ne nous correspondent plus vraiment à l’heure actuelle, mais cela reste le reflet de ce que nous étions à l’époque

Mindlag project présente t-il un nouveau visage en 2009 ? Si oui quels sont les elements qui ont changé/évolué au sein de votre musique ?

Je ne pense pas que nous ayons un nouveau visage, mais que pour la première fois nous sommes en adéquation totale avec ce que nous voulons faire depuis toujours. Nous avons effectué une sorte d’introspection musicale. Nous avons cherché à créer notre son, et finaliser notre univers avec cet album. Nous avons beaucoup travaillé pour rendre notre musique la plus naturelle possible, notamment au niveau de la production, où Christian CARVIN nous a été d’une aide précieuse. On peut dire que notre musique est devenue beaucoup plus progressive, mais je pense que c’est inhérent au fait de raconter une histoire, car le récit impose beaucoup plus de nuances. De ce fait, notre façon de composer est plus filmique, nous essayons de créer des images qui correspondent aux sentiments que nous voulons exprimer. Je pense que c’est ce qui a le plus évolué dans notre musique, le fait d’être plus dans le registre du ressenti.

Peut-on encore dire que Mindlag project joue du metalcore en 2009 ? Si non quels sont les principales influences que l’on retrouve dans votre musique ?

Personnellement, je fuis les étiquettes, et je ne pense pas que nous ayons un jour appartenu au style Metalcore, mais par contre, nos principales influences étaient bien sur le thrash et le heavy metal, qui restent nos principales influences, ainsi que le HxC. A l’heure actuelle, nous sommes moins influencés par le HxC que par le passé au niveau musical, mais cette influence est toujours présente. Je pense que ce style nous parle plus en terme de mouvement, et ce sont les valeurs qu’il défend qui nous interpellent, même si elles ont été perverties ces derniers temps, ce que nous déplorons. Par contre, nous avons développé des sonorités qui peuvent se rapporter au death mélodique, au rock progressif, au Doom voire même au black metal. Mais comme je le disais plus avant, ce qui nous importe ce n’est pas l’étiquette qu’on nous colle, car nous aimons beaucoup de choses, et nous nous sommes toujours senti enfermés par celle-ci. Nous préférons jouer inconsciemment ce qui correspond le mieux à ce que nous voulons exprimer, et de cette façon, le processus créatif fonctionne bien mieux pour nous.

Tous vos albums ont pour acteur principal un personnage nommé Jon De Grimpclat. Peux tu le présenter ?

Jon est un criminel, mais c’est avant tout un humain. Je pense que c’est ce qui nous importe le plus. Nous essayons de le montrer sans fard, en mettant l’accent sur ce qui motive ses actes, qui sont souvent des intentions louables, mais nous sondons aussi bien sa folie. Il prétend être un justicier, possédant le pouvoir de juger qui est apte à vivre au pas. C’est un sombre dandy charismatique, et c’est ce qui le rend attachant. Il incarne la part sombre de chacun de nous, à la fois attirante et dangereuse, et c’est la voie royale pour aborder ce sujet avec subtilité pour nous.

Quels sont ses aventures dans ce nouvel album ?

Nous avons choisi de faire un focus sur une période de la vie de Jon qui l’a fait basculer. Même si c’est un meurtrier, il se fixe des règles bien précises pour tuer, et l’une d’entres elles lui interdit de tuer quelqu’un qu’il juge innocent. Mais dans la chanson Doomsday, sur l’album Skylla, un promeneur noctambule surprend Jon en train de tuer quelqu’un. Cet album prend la suite du récit à ce moment là, où Jon, la mort dans l’âme, doit se résigner à éliminer cet innocent, car autrement c’est lui qui risque de perdre sa liberté. On retrouve alors Jon face à son humanité, Il descend enfin de l’Olympe, et commence à avoir conscience de sa folie, sans pouvoir y faire grand chose. Le récit comporte aussi pas mal de flash-back qui permettent d’en savoir plus sur le passé de Jon.

Comment se retrouve t-on a proposer des « concept albums ». Pourquoi avoir fait ce choix ?

Ce n’est pas un choix pour nous, mais plutôt une nécessité. Nous avons besoin d’avoir un contenu qui s’inscrit dans la durée, c’est notre source d’inspiration. Et puis nous sommes animés par une certaine idée de l’art, qui reprend le concept « d’œuvre d’art total » qu’évoquait Richard Wagner, et il est important pour nous de maîtriser tous les aspects de notre œuvre, quelque soit la forme d’art. Et le concept album est pour nous le meilleur moyen dont nous disposons pour assouvir ce désir.
D’autre part, nous avons une profonde admiration pour des albums tels que « The wall » de  Pink Floyd , « Outside » de David Bowie, tous les albums d’Iron Maiden, ou encore « Obsolète » de Fear Factory. Nous avons accroché sur cette façon de faire depuis bien longtemps, et c’est donc peut-être aussi par mimétisme quelque part.

Quels retours du public recevez vous vis à vis de votre démarche artistique et de votre travail sur les textes ?

Nous avons pas mal de retours qui nous enthousiasment. Disons que les personnes qui accordent de l’importance aux textes et au concept en général y trouvent souvent un intérêt, du moins quand ils se sentent proches de notre univers, mais je pense qu’une bonne partie des gens qui nous écoutent n’ont pas forcément besoin de tout ça, et s’intéressent strictement à la musique. Ce qui n’est pas du tout un problème, c’est une chose que je conçois très bien, et je pense que la façon dont on architecture notre musique influe de toute façon sur notre musique de façon intrinsèque, ce n’est donc pas peine perdue.

La mythologie grecque semble avoir une place importante pour vous etant donné que l’on retrouve ce thème dans tous vos albums. D’où vous vient cet intérêt ?

C’est tout d’abord une histoire de goût, et puis Jon étant professeur de langues anciennes, c’est logique que nous ayons une forte propension à évoluer dans cet univers.
Mais il y a bien sur une cause plus profonde. Nous pensons que l’homme à besoin de symboles auxquels se rattacher, et ce sont des composantes universelles, permettant d’assimiler une idée ou un concept en un instant. Nous aimons utiliser les symboles, et nous aimons les mélanger entre eux, même s’ils viennent d’horizons différents, c’est notre aire de jeu favorite. D’autre part, la civilisation grecque comporte beaucoup de points communs avec la notre, et cette rémanence historique est aussi une chose dont nous nous servons beaucoup.

Quelles ambitions avez-vous avec ce 3eme album ?

Nous espérons que ce sera l’album de la reconnaissance, car nous aspirons à vivre de la musique, c’est bien plus qu’une passion pour nous. Nous voulons tourner le plus possible, et partager le plus de chose possible avec notre public. Ce que nous désirons le plus, c’est nous épanouir artistiquement, et pour cela il faut que la musique devienne notre véritable métier. Cela prendra le temps qu’il faut, mais nous y parviendrons, car nous sommes déterminés.

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